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19 juillet 2011 2 19 /07 /juillet /2011 21:57

Une fois n'est pas coutume: c'est le drame et quand d'autres s'aérent l'esprit à 19h à coups de mojitos bien tassés, d'autres lèvent leur verre à leur ras le bol et à l'éponge jetée, le breuvage magique dans le gosier.

Emmanuelli qui démissionne c'est un peu comme si Coluche dénonçait les Restos de coeur comme "le pis-aller" des pauvres, la couverture de survie qui camoufle la misère pour les bien-pensants à coups de shows nauséabonds et de reprises musicales mal ficelées.

 

Disons le haut et fort:  Un "Fuck off" fait avec style et élégance d'un sexagénaire, un refus de se sentir impuissant, un refus d'entrer dans l'intransigeance, une façon de laisser les minables derrière, plus fort que tous les discours et les manifestations...

Tant de pages et d'encre versées sur celle de Georges Tron, haut fonctionnaire invisible et inutile, quand sera t elle de celle qui a lutté contre la maltraitance faite aux indigents? Certainement pas grand chose car là, si le scandale existe, il est si peu sexy, trop peu racoleur pour qu'en ce mois de juillet, elle fasse grand effet.

Pourtant, on aimerait y croire à cet acte symbolique et révolutionnaire qui questionne et me trouble, j'aimerais y croire que celui-ci va nous éclairer d'une lumière qu'on espère à peine, illustrée par le trop peu de manifestants qui se mobilisent jour après jour.

Quand on s'exclame si fort face au succès du pamphlet "Indignez-vous", j'ai fort à penser que l'indignation n'est plus un ressenti mais un simple exercice intellectuel. Il est bon de croire qu'une pensée hors norme, on en a une. Il est bon d'y croire, tout simplement....bêtise occasionnée par le trop plein de culture et de médias, croyance qui ne forge plus la conscience mais l'excès de suffisance.

L'ultime question toujours et encore: ils en disent quoi les travailleurs sociaux, éternels absents des considérations qui sont les leurs, tous les jours? Pêchent ils par ignorance, manque de reconnaissance ou négligence?

La machine est lancée, ravageuse, un rouleau compresseur sans retour en arrière possible car si les élections peuvent geler temporairement le processus, l'immondice est en chemin...La vraie galère arrive.

Et quand, intervenant en école de formation d'assistant social, je clame que "la période glorieuse du travail social est derrière nous et que viennent les pires années depuis des décennies",des gamins de 20 ans qui veulent changer le monde me supplient "Vous nous dites ça mais vous ne nous donnez pas la solution sauf de nous déprimer". Exact, c'est déprimant mais la réalité est terrible à un point qu'on s'attache à un sourire esquissé, un "Merci" murmuré..des miettes de reconnaissance quand on a mouillé la chemise au point de l'essorer. Des bébés SDF, des femmes maltraitées, des gamins partis pour sauver la société...de la chair à canon qui se fait trucider dans l'ombre et qui devra ravaler ses larmes de douleur pour ne pas finir retraité à 35 ans.

 

Un homme honorable nous a quitté aujourd'hui et 7 soldats ont été inhumés en grandes pompes au Panthéon. Parce qu'il est essentiel de rendre hommage aux grands hommes, ce jour était teinté d'une triste ironie.

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15 juin 2011 3 15 /06 /juin /2011 22:00

SuperAS rompt les habitudes et son ton policé et poétique. Plus de 9ème parallèle, de souffrance muette, de larmes silencieuses, de combat glorieux, d'instants suspendus où SuperAS atténue à coups de phrases ampoulées la violence des tragédies humaines et du système pour mieux les digérer.

Mais la rage de SuperAS n'a pas de son  ni de cris, seulement résumée en un poids sur l'estomac et une douleur cérébrale apparue dès 11H50 ce matin.

Je l'avais anticipé cette journée, endossée l'armure la veille au soir pour y survivre, couchée tôt exceptionnel, comme la veille du bac, coachée mentalement cette journée marathon pour faire briller mes capacités de réactivité.

L'agenda est plein: 7 rendez-vous pour la journée, deux écrits à taper et le 115 à appeler.

Ca ressemble à une journée d'AS, rien de très folichon mais un cauchemar ressemblerait il mieux à cela?

Bizarrement, après 1H30 d'attente avec le 115 et deux rendez vous décalés pour l'après midi, je reste zen, malgré cette musique lancinante qui me taraude les tympans "ne quittez pas, votre appel est pris en compte, un permanencier va vous répondre". Le portable à la main, le haut-parleur branché, je vais pisser, fumer, taper un courrier, répondre à mon portable perso, faire un tour sur le trottoir. Autant dire, j'optimise psychiquement ce qui s'avère être un vrai moment de torture professionnelle. Mais je lutte, je suis relax, car je connais déjà la réponse de la gentille étudiante potentielle qui  me répondra, du soleil dans la voix "on n'a pas de place".

Bingo, ca ne rate pas: à 11H30, pas de places ou plutôt seulement 4 places pour la journée. Au temps chercher une aiguille....Mais préparée je le suis alors je reste relax, je badine presque avec la permanencière du 115 qui doit s'étonner de ma disponibilité. Je suis confiante: on la garde un point c'est tout.

J'ai envie d'une pause pour cette entrée en matière  mais le serrement au ventre arrive: voici les autres patientes qui m'attendent, elles également sortantes mais sans maison et sans soutien.

 

 Et là un tressautement, un début de quelque chose: de l'angoisse, l'envie d'éviter leur présence, l'entretien, leurs larmes parce que ce n'est pas une mais deux, puis trois puis quatre et la cinquième (que j'ai reporté), qui ont toutes la même angoisse: je vais aller où après? Dans une, deux ou quatre semaines?

Mais là parce que je viens de me balader, le poste aux oreilles, façon walkman and co, je connais la réponse: j'ai vérifié ce que je savais déjà, encore et toujours.A l'heure où elles et leurs bébés s'éclosent face à la vie, de souffrance afin apaisées, je suis auprès d'elle, enfermées dans une prison sans issue.

 

Prise dans les entretiens et le temps qui file, j'aligne, similaire à un officier de la Stasi. J'assène cette réalité brutale, moi-même complice de cette violence muette, évitant les silences et les larmes, pour rendre efficace le peu de temps qui s'offre à moi. Je fais l'AS, la mauvaise, directe, celle que j'aborre parce que démunie, je le suis et que deux solutions s'offrent à moi: fuir en milieu de journée de cette ambiance oppressante ou y faire face sans faire front, la tête basse.

Je les aligne et je me sens vide, errant dans les couloirs pour confier mon désarroi: qu'allons nous faire de toutes ces femmes sortantes et douloureuses lorsque personne ne prendra le relais, malgré le travail fait?

Je rencontre le chef de service: sa réponse est lapidaire. Elles sortiront même si elles doivent rester sur le trottoir: on ne se subsistera pas à un système qui flanche. La position politique est cohérente mais qu'en est il de l'éthique? Je tremble...d'un état de fait que j'annonçais moi-même depuis des mois mais la théorie me rattrape et m'aspire. Que vais-je bien pouvoir supporter de faire ou de ne pas faire face aux obligations de l'établissement?

La colère gronde en moi bien moins forte qu'auparavant: je suis terrorisée par mes propres mots, mon propre métier, mon propre pays.

 

Je refuse de comptabiliser les victimes qu'il faudra compter parmis nos femmes. Je propose la province à une femme malade pour qu'elle puisse retrouver ses deux aînés, placés à sa demande. Elle doit choisir: quitter sa région, ses proches et ses repères et retrouver ses enfants ou rester en perdant la garde de ses enfants. C'est un choix viable vous pensez?

Face à ce constat alarmant où le Samu social n'exerce plus ses missions, le SIAO pas encore opérationnel, les structures d'hébergement surbookés, branlebas de combat chez les médecins et à la Direction: c'est pas normal, faut revoir les admissions, on écrit aux instances les plus hautes et blablablas et blablablas encore et toujours....Faut croire que j'ai pissé bruyamment dans un violon durant des mois  pour ne pas réaliser que j'étais entourée de malentendants.

Ironie du sort: faut continuer à remplir l'établissement pour pouvoir survivre et les dossiers s'amassent d'histoires plus sordides et dramatiques, de précarité en ......précarité. Alors on remplit sans pouvoir désemplir, et  la rue directe après, ou on stoppe, quitte à être au chômage dans 3 ans?

Et les placements qui ne se font pas comme ils devraient et les erreurs de la CPAM, de la CAF qui alourdit toujours plus la facture et le travail et les "elles sont où les éducs?", "Qu'est ce qu'elles foutent?" alors qu'elles s'échinent dans des accompagnements périlleux...Entendre sans cesse l'épuisement des équipes, leur ras-le bol quand les cheveux en pétard et l'oeil bas, tu les entrevois avachies à faire la causette avec les patientes et où une envie d'un meutre collectf te prend brutalement.

Ne plus se sentir comme un fer à cheval, pris entre le marteau et l'enclume, mais comme une voiture à la casse qui part à la compression de la tôle, petit cube rectiligne aux aspirités bouchées.

 

Alors on peut en faire des tonnes sur l'égalité des sexes, le harcèlement sexuel ou moral dont sont victimes les femmes au quotidien, actualité oblige, elles peuvent hurler les féministes sur l'inégalité de traitement homme/femme, la société machiste mais tous, nous sommes tous complices d'un système aveugle, maltraitant et assexué  qui annonce déjà le devenir des générations à venir.

Et j'envie de nouveau le monde du spectacle et des médias où le drame humain et social n'est qu'épisodique et fictif. 

 

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18 janvier 2011 2 18 /01 /janvier /2011 22:56

 

Rompre un long silence imposé et imposant, c'est raté une marche quoique l'on dise, c'est être maladroit et inconstant, se justifiant sans cesse d'une infidélité que l'on ne peut pas éviter...

Exit les justifications et reprenons le court des choses, la plate réalité, la mienne, celle de femmes d'aujourd'hui, silencieuses, étouffées dans l'ombre, reprenons une réalité qui m'éclate à la gueule comme si j'étais une jeune première de 25 ans: la misère, lorsqu'elle est invisible, ne concerne plus personne.

Elle appitoie, elle soulève les débats, les coeurs,  les bras des manifestants quand elle se montre et bien souvent sous son maquillage le plus douteux et ouvre les caisses de l'Etat.

Mais que se passe t il? Où sont elles les voix de la colère, résonnant avec la mienne, sourde, où sont les témoins passifs, muets du massacre auquel nous assistons? Mais ils sont où les travailleurs sociaux???

Dans ma courte carrière, je me suis intéressée aux sans-papiers, à la législation des étrangers, aux toxicomanes, aux malades mentaux, c'est à dire à peu près tout ce qui ne peut pas concerner le dit "Droit commun", c'est à dire aux plus désoeuvrés, aux moins insérés et insérables (par pure définition), à ceux que beaucoup considèrent comme "des causes perdues". On s'implique, on se bat mais quelque part, la chose est sans fin: la révolution ne se fera pas, la colère est là mais l'impuissance et la législation  vous donne raison dans ce vain combat...Et puis les toxicos et les fous ne sont que des fous et des toxicos, habitués à la rue, endurcis par la rue...Ils tiendront encore et encore....Et quoiqu'on dise, y 'a des sous de la Providence pour les toxicos à Paris parce que ca fait désordre dans un quartier de déloger un squatt et de ramasser des pompes par dizaines tous les matins par les éboueurs de la Mairie...Alors oui, y'a des moyens pour la santé publique quand elle concerne l'intérêt de tous: l'ordre public.

Mais le Droit commun vous raconte une autre histoire, un conte d'une toute nature.

Le droit commun, c'est à dire tout dispositif d'aide sociale pour toute personne le nécessitant, ne vous dit  qu'une seule chose: NE VIENS PAS!!

N'aies jamais le malheur d'en avoir besoin: n'aies jamais d'accident de la rue, choisis bien tes amis, aies une bonne famille, un bon travail, de bons revenus, une bonne vie, sans maladie, sans décès, sans accident de la vie, ne t'autorises pas à déprimer ou à démissionner, ne sois pas trop ambitieux, paies bien tes factures, penses bien à faire ta demande HLM à ta majorité, aies une crise d'adolescence modeste, choisis bien ton mari, ni trop indépendant, ni trop violent car si la vie te fais basculer, toi et tes enfants, si un beau jour, tu ne pourras décemment compter que sur toi-même, qu'adviendra t il de toi? La société civique  dans laquelle tu auras tant investi, de ton temps et de ton argent, te sera t elle reconnaissante?

Le Droit commun, c'est toi, c'est moi et nous autres, comme tendus au-dessus d'un précipice et cette brèche béante, si peu accueillante.Jamais il n'aura été tant question de déshumanisation des êtres et des systèmes, jamais je n'ai eu tant honte d'ouvrir  la porte de mon bureau tous les matins avec cette étiquette bleue prétentieuse "Assistante sociale", jamais ce titre n'aura eu si peu de sens, jamais mes silences n'auront été si embarassants en l'absence de solutions pour ses femmes qui ont bien mis souvent au monde leurs bébés, au péril de leur vie. Des heures et des heures de recherche pour un abri stable, temporaire, toujours précaire, des heures pour rien,en fin compte, des heures pour envisager l'inévitable: le recours au 115, Samu Social, saturé lui aussi...

Alors que faire? Que faire lors de ces faces à faces que je redoute tous les jours davantage, à ces demandes récurrentes "Je viens aux nouvelles" et à ces listes de structures que je sollicite, 10, 15, 25 et à des délais improbables que l'on m'annonce, 3,4,6 mois? Que faire sinon dire l'inéxorable vérité, celle qui me fait pâlir de colère et de honte?

Notre Iphigénie, si douloureuse, en est la noire incarnation, notre Iphigénie, immobilisée avec son bébé, qui ne demande qu'à sortir, ne peut pas sortir. Et les autres, encore et encore...leurs bébés sous le bras, quelle est cette société qui ne sait pas les accueillir parce qu'elles sont trop vieilles ou trop fragiles: elles sont juste en trop peut être, tout simplement...

Les chiffres de la démographie sont tombés aujourd'hui: nous sommes 65 millions d'habitants avec un taux de fécondité le plus haut depuis 30 ans et une précarité toujours aussi grandissante. L'âge du 1er enfant récule, recule et aucun dispositif n'est prêt à recevoir ces mères toujours plus nombreuses et trop vieilles, selon les normes de l'administration du Droit Commun.

Quel société offrons nous à ces bébés à venir, condamnés à vivre dans l'insécurité sociale, dès la naissance? Qu'offrons nous comme choix éducatif à ces femmes?

Zéro de conduite pour les années qui s'annoncent , zéro de conduite pour les réformes de ces dernières années, zéro de conduite pour la loi APPARU...

Zéro de conduite car c'est la seule chose qui me reste encore: la rage de mettre des mauvaises notes, comme un prof aigri, pour ne pas déprimé de voir ses connaissances et son ambition fondre comme neige en soleil, face à tels cancres, insolents et ignares....

 

 

 

 

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12 décembre 2010 7 12 /12 /décembre /2010 22:04

Cher Augustin,

 

 

Cela fait plusieurs jours que je pense à toi, inlassablement...

Les pieds mouillés, dans ma banlieue chic, je me faufile entre les flaques et songe comme beaucoup d'autres à ce qui adviendra ce soir des exclus, des moins exclus qui rentrant d'un travail mal payé, ne connaissent pas leur point d'arrivée.

Tu les aimes, toi, les exclus, tu leur a fait une grande déclaration d'amour il y a maintenant 4 ans et tu continues à leur être fidèle.

Je ne suis pas jalouse car je les aime aussi, tu sais mais toi, tu as gagné leurs coeurs, parmi ceux que tu as permis de reloger, par la force de ton combat. Je ne prétends pas vouloir rivaliser avec toi.

 

En 2007, je me souviens: une femme toxicomane avec son conjoint de l'époque, violent et sadique, et je souhaitais utiliser l'outil de l'hébergement pour la séparer de lui. Elle en avait envie, j'avais trouvé une solution, pour elle seule, et puis tu es arrivé et là, ils ont décidé, tous les deux, d'aller crécher sous une tente, avec toi, parce que déjà l'Etat avait réquisitionné les hébergements existants, laissant alors à la traîne ceux qui attendaient depuis plusieurs semaines. Elle est restée avec lui, rien de très étonnant en fait, tu n'y es pas pour grand chose, ne culpabilises pas, je t'en prie. 

J'en ai un autre, toxicomane stabilisé et malade, qui n'a pas obtenu la chambre d'hôtel qui lui était garantie, après une procédure d'admission, parce qu'alors les "Don Quichotte" avaient alors le privilège de la priorité. Là, tu peux culpabiliser, il me semble....

 

Je t'ai découvert en 2007, je t'ai régulièrement entendu en 2008, 2009 et aujourd'hui en 2010 faire tes déclarations d'amour au nom des exclus et j'ai envie de te répondre, non en leur nom, mais au mien seulement.

 

Ah Augustin, injustement nommé successeur à l'Abbé Pierre...réunissant alors autour de toi, en 2007, plus d'une quarantaine d' associations pour un Droit au Logement pour Tous. Tu les as tous scotché avec ton idée novatrice, tu les a pris par surprise: on pourra au moins te reconnaître cela.

 

Et tout le monde t'a suivi, personne ne s'est levé contre ce mouvement qui prétendait bousculer le système et qui à vouloir le bousculer, la verrouiller de l'intérieur. Personne n'a vu venir l'évidence: créer un Droit, c'était avant toute chose, faire intervenir l'Etat sur tous les dispositifs existants, légiférer universellement l'accès à l'abri c'était emboliser encore davantage un système qui peinait à avancer, c'était nier les différences existantes dans l'exclusion. (personnes malades, familles expulsées, familles migrantes, grands exclus...). Moi, simple assistante sociale, j'y ai pensé à l'époque: étais-je toute seule?

 

En 2007, on ne pouvait pas te critiquer, Augustin... Comme si la question de l'exclusion pouvait se satisfaire de la médiocrité...en pleine période électorale, tu t'es pas méfié que c'est la boîte de Pandore que t'ouvrais.

Tu continues et continues à prendre la parole chaque hiver, à défendre des positions en oubliant cruellement ce à quoi tu as participé: la mise à mort d'un système public et associatif, compétent et spécialisé mais en manque cruel de moyens.

 

Car depuis 2007, que s'est il passé? Le Droit au logement opposable, qui ne demeure qu'un droit, mais qui, parce que c'est un droit, a ouvert les vannes de l'ingérence. La question du logement et de l'hébergement est devenu une mission d'Etat et à ce titre, l'Etat intervient dans toutes les questions qui s'en rapportent. Concrètement, certains départements se sont désengagés de cette question (exit les dispositifs départementaux qui assuraient "un peu"), la demande départementale de logement social disparait et devient régionale, l'accès aux structures d'hébergement est désormais centralisé par une instance départementale mais nationalisée et purement administrative (le SIAO) qui "dispatche" les demandes et ce sur toutes les structures associatives, quel que soit la spécificité et l'historique de leur travail. Ils ont pour obligation de jouer le jeu: normal, leur payeur c'est l'Etat et avec la régionalisation, on est baisé.

La proximité n'existe plus, le travail de partenariat est gravement mis en danger. Mais à quoi pensais tu en 2007? Tu t'es pris pour Coluche ou quoi, t'as cru au Grand soir??!...Toi et tes comparses vous nous avez enterrés, nous travailleurs sociaux et eux les exclus, vivants. On devrait s'en mordre les doigts,nous professionnels du social, d'avoir laissé faire, d'avoir continuer à oeuvrer en silence sur nos situations comme si la vie en dépendait...

 

Concrètement que se que t'as foutu?

Avant 2007, tu attendais deux heures pour obtenir une possible place d'hébergement avec le samu social. Maintenant, c'est 4h pour une personne seule et encore si t'arrives à les avoir...Pourquoi? Parce que tu disais que c'était dégeulasse et inhumain de remettre les gens au bout d'une ou deux nuits. Quelle a été ta solution? Les places d'urgence sont devenues des places de stabilisation, c'est à dire "J'y suis, j'y reste": tant mieux pour ceux qui y étaient déjà et les nouveaux? Ils vont où eux? Quelqu'un était il assez naif pour penser que l'Etat allait doubler le nombre de places d'urgence ou de stablisation? On s'est juste contenté de transformer la soupe, sans y apporter d'ingrédients supplémentaires....Je me souviens: tu étais contents de tout ça, tu attendais les résultats des engagements pris, promettant d'être vigilant, tout de même: Ah ouais?

 

Et les familles? Les familles, n'y pensont même pas: a titre personnel, j'ai déjà passé 6 hrs au téléphone( au mois de septembre) avec deux lignes séparées sur haut-parleur avec en son dolby surround "Vous êtes bien au 115, ne quittez pas, nous allons donner suite à votre appel..." ca raccroche, tu rappelles et à 17H30, tu laisses tomber parce que de toute façon, passé 10H, tu sais que t'aurais rien...D'ailleurs qu'est ce qui m'a pris de continuer: l'éthique, bien sûr, si chèrement enseignée...Putain, 3 ans d'étude: pour ça!!!!

 

T'as une réponse à me faire pour la mère avec son gamin qui va crécher dehors? Tu les accueilles chez toi?Parce que moi, non...3 ans d'études pour appréhender la distance suffisante...

 

Ton militantisme à la con a signé notre mise à mort, à vouloir faire la révolution, tu les a sacrifiés: les malades mentaux, les femmes avec enfants, les toxicomanes, les travailleurs pauvres, les sans-papiers...et un travail de long haleine qui s'intitule le "partenariat inter-institutionnel" et qui résidait dans un échange de pratique professionnelle éclairée.

Alors quand je sens la neige sous mes pieds et que j'entends ta voix de clown comme si la fin du monde était proche, je suis furieuse, je ne peux pas faire dans la demi-mesure...L'égalité des chances n'existera jamais, c'est une douce utopie alors face à la misère, c'est un fantasme que seuls les igonorants peuvent avoir.

 

Alors s'il te plait, au terme de 4 ans de mon silence furieux, Augustin, tais toi et retournes au cinéma...Je sais pas si tu seras meilleur mais tes dégats ne seront que fictifs...

 

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12 décembre 2010 7 12 /12 /décembre /2010 21:40

Le vent s'affole dans l'après midi, l'alarme incendie sonne sans dicontinuer, une lumière de fin du jour et l'établissement est en alerte pour une Phèdre vieillissante, enfermée avec son bébé, sur l'autel du sacrifice...

C'est la routine...les mécaniques professionnelles reprennent le dessus, les mots tombent, crûs: "parquet, signalement, incapacité, pathologie, danger" enrobés dans une douce litanie sucrée que nous demande sans cesse le système.

 

IL FAUT ELABORER, vous dis je...Sans cesse, sans cesse mais l'imagination manque alors que faire? toujours les mêmes expressions, les mêmes nuances en pagaille "il semblerait que....Elle a pu dire....Il est nécessaire que ce travail puisse être continuer....capacités et préoccupation maternelle, réelle autonomie, s'interroger sur, prise en charge difficile, toutefois, relatif....Toujours, toujours les mêmes mots, les poncifs habituels indispensables à la bonne continuité de toute cette machine..

Ah ces fameux rapports sociaux: une nouvelle forme de roman photo qui excite ceux qui les reçoit, objet de tant de souffrance pour celui qui les écrit. La biographie express avec date de naissance, histoire de vie, besoins nécessaires, possibilité pour l'avenir.

Le rapport social c'est l'arme de l'assistant social, son catalogue de vente par correspondance, son stand à camelot avec démonstration tous les 1/4 d'heure s'il vous plait!

 

-les droits ce sont les droits comme le chiffre c'est le chiffre: qu'importe de croire au produit, vendez, vendez, vendez car qu'allez vous faire de toute cette misère qui entre par votre porte?

-Une démonstration tous les 1/4 d'heure dans la journée, pour un produit vendu (et bradé s'il vous plait pour un lit avec habitants sous les draps)

 

Exemple: trouver une piaule pourrie à 600€ par mois pour un toxico tout pourri que personne n'en veut et faire du charme au marchand de sommeil qui vous met la main sur la cuisse et sourit de ses dents noires, en vous disant ' Oui, Mme....on va pouvoir s'entendre, je crois". Dégoter la chambre avec un sourire polie et se dire que La Jeannot et son air angelot a menti à une gamine de 10 ans...

Le rapport social, c'est 1,2 voire 3 heures de boulot et 1h de mise en enveloppe. Quelques heures de travail sans résultat...

Ah non, ne parlez pas de résultat! Pas de politique du chiffre ou vous allez tuer le travail social! Ah bon? vous préférez travailler pour rien, vous?

 

Le rapport social, c'est un appel d'offre, digne des meilleurs commerciaux: un peu de thune pour aider la fin du mois d'une famille expulsée, une place d'hébergement à grapiller? Tout le monde affûte ses meilleurs arguments, liste le budget si intime d'une famille humiliée, défend l'évolution d'insertion si positive de l'usager à caser...Et la concurrence est rude...vos adversaires en face? Connais pas, juste une estimation du nombre d'adversaires: quelques centaines, quelques milliers même...La misère concurrence la misère.Et le rapport social, si chêrement travaillé au nom de l'éthique, circule de main en main, fait de blagues douteuses (que celui qui ne l'a jamais fait, lèves la main que je le bénisse) et de commentaires assassins...

 

Le rapport social ou l'ultime façon de tirer à vue: partenaire professionnel et plus souvent encore, l'usager....

Ne pas s'y méprendre mais le travail social est une nouvelle guerre moderne, longue et silencieuse, où chacun se jauge, s'épie,de l'usager à l'AS, de l'AS aux partenaires, des associations nationales aux parlementaires...

 

Et l'éthique me direz vous? Et bien l'éthique je me la balade sous le bras comme un beau sac que je viens de me payer...Je la démontre, je frime avec, je l'assortie en fonction des évènements, de l'humeur et des contrariétés du jour...Je défends mon choix parce que celle-ci est trop criarde mais qui a dit qu'il fallait pêcher par excès de discrétion? Pas la parisienne d'ELLE, en tout cas...Je me la balade parce que le système me balade alors j'adapte sans cesse...sans trop me contrarier, sinon je ne reviens pas bosser.

 

Le manque de résultat tue l'envie, anhile le désir d'agir mais quelquefois tout de même, avec ce monde qui bascule à n'en plus finir, quelquefois la grace vous touche et vous éprouve, à vous faire lever les bras au ciel devant les collègues car la victoire est là...Du moins, à la mi-temps, vous menez 1-0...les qualifications pour le championnat vous attendent mais vous avez l'espoir d'une éventuelle victoire.

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